Lot 100
GUILLAUME GUILLON LETHIERE (SAINTE-ANNE, GUADELOUPE 1760-PARIS 1832)
PORTRAIT D'ADELE PAPIN JOUANT DE LA HARPE
Toile d'origine
Dans son cadre d'origine
Dédicacé sur le livret de partitions bleu Dédié / à sa maman / par / ADELE PAPIN
Signé et daté en bas à gauche Gme / LE THIERE / AN . 7 . (1799)
Portrait of Adèle Papin playing harp, original canvas and frame, dedicated on the partitions book Dédié / à sa maman / par / ADELE PAPIN, signed and dated lower left Gme / LE THIERE / AN . 7 . (1799)
179 X 147 CM - 70 1/2 X 57 7/8 IN.
€50,000-70,000
PROVENANCE:
Conservé dans la famille du modèle depuis l'origine.
EXPOSITION :
Salon de 1799, n° 218 (Une jeune femme à la harpe).
BIBLIOGRAPHIE :
G. Cabannes, La galerie des Landais, 1930-1945;
G. Madec-Capy, sous la direction de B. Foucart, Guillaume Guillon-Lethière peintre d'histoire (1760-1832), 1998, P. 37.
Fils d'un martiniquais, Procureur du Roi à La Guadeloupe et d'une guadeloupéenne, Guillaume Guillon vient travailler à Paris en 1777 dans l'atelier du peintre d'histoire Gabriel-François Doyen, après un passage?à Bordeaux et à Rouen. Il est à Rome comme pensionnaire de l'Académie de France jusqu'en 1791 et ouvre son atelier en rentrant à Paris. En 1799, il travaille à une série de quatre tableaux sur l’histoire romaine. Seuls deux furent achevés : Brutus condamnant ses fils à mort dont il présente une esquisse aux Salons de 1795 et 1801 avant d’achever le grand format en 1811 (toile, 440 x 783 cm, acquis par le musée du Louvre en 1819), et Philoctète dans l’île de Lemnos qui reçoit le prix d’encouragement au Salon de 1798 (toile, 345 x 315 cm, Musée du Louvre). Il est nommé à la tête de l’Académie de France à Rome en 1807 et poursuit une grande carrière de peintre d’histoire.
Sur notre tableau, il signe encore Le Thiere (troisième fils de Pierre Guillon). Reconnu par son père la même année, il modifiera alors son nom en "Guillon Lethière".
Rares sont les portraits peints par Guillon Lethière. Il réserve ce genre à des intimes. En 1806, il représente les portraits du frère et de la soeur de l'empereur, Portrait de Lucien Bonaparte (Toile, 223 x 162,5 cm. Vente, Paris, George V, Mes Ader Tajan 15 décembre 1993, n° 89) et Portrait d'Elisa Bonaparte (Toile, 217 x 141 cm, Château de Versailles et de Trianon).
Dans notre tableau, il donne une dimension particulière à l'instrument de musique. La présence de la harpe est aussi importante que celle du modèle, cela pour signifier l'importance du lien entre Adèle Papin et son instrument.
Notre tableau indique les relations amicales entre le peintre, la modèle et le facteur de harpe, probablement auteur aussi de la partition.
Notre harpe ressemble fortement aux instruments réalisés par Jean Henri Naderman (fig 1) puis ses fils.
Originaire de Frigourg, Jean Henri Naderman arrive à Paris en 1762 au service de la reine Marie Antoinette pour réaliser et perfectionner ses harpes. Harpiste, compositeur, facteur de harpes, il tient un magasin de musique à Paris. A sa mort en 1799, sa femme et ses deux fils, François Joseph et Henri reprennent son activité. Ces derniers sont aussi professeurs. François Joseph est le plus réputé, il ouvre la classe de harpe au Conservatoire de musique de Paris. En 2013 est passé en vente un recueil de musique offert par Naderman fils à Mademoiselle Adèle Papin (Piasa 11 juin 2013, n° 70).
Contemporaine de François Joseph Naderman, Adèle Papin (1782-1860) est originaire de Mont-de-Marsan (son père, Jean Baptiste, est avocat, receveur des Finances et membre du Corps législatif en tant que député des Landes). Adèle a 17 ans, lorsqu'elle est représentée par Guillon Lethière jouant probablement pour sa mère, selon la dédicace inscrite sur le livret de partitions. Elle est représentée dans un intérieur richement meublé, elle est assise sur un fauteuil Jacob, devant un vase à l'Antique. Elle est vêtue d'une robe de mousseline. Avec son châle sur sa chaise, cette mode marque une fracture avec les volumes de Marie-Antoinette et une recherche de beauté au naturel.
Est-ce par la branche des Papins de la Martinique que Guillon Lethière connait notre modèle.
Cela reste à élucider. Notre tableau nous plonge dans l'intimité du modèle, avant le dynamisme de sa vie d'épouse au début des années 1800. Elle épouse en effet en 1802 le comte Charles Jacques Nicolas Duchatel (1751-1844), de trente ans son aîné (membre du Conseil des Cinq Cent puis Conseiller d'Etat sous Napoléon, il est fait comte d'Empire en 1808) et devient dame de compagnie de Joséphine de Beauharnais. Ils ont deux fils, Tanneguy (1803-1867) et Napoléon-Joseph (1804-1884).
Tanneguy est un prénom familial rappelant les hauts faits de Tanneguy Duchâtel, chambellan et prévôt de Paris, conduisant le dauphin, futur Charles VII, hors de Paris la nuit du 28 au 29 mai 1418, quand les bourguignons entrent dans Paris (tableau de Louis Charles Auguste Couder vers 1827 Rennes Musée des Beaux-Arts). Le prénom donné à leur deuxième fils, Napoléon-Joseph, pourrait laisser soupçonner une possible liaison d'Adèle avec l'Empereur. Elle s'installera à la fin des années 1810 au château de Mirambeau en Saintonge. « Elle [était] faite pour plaire, tant par sa grâce naturelle que par celle qu’elle voulait avoir. Elle avait de plus un fort joli visage, de belles dents qu’elle savait faire valoir, un nez aquilin qui se faisait peut-être un peu trop valoir sans qu’elle s’en mêlât, et quoiqu’assez maigre, une grande distinction dans la tournure » (Joseph Turquan d’après la Duchesse d’Abrantès). « Elle possédait un charme irrésistible dans le regard prolongé de son grand œil foncé de sa double paupière […]. De tout ce que je viens de dire, il résultait un ensemble qui attirait d’abord, et puis qui attachait ». (Mémoires de la duchesse d’Abrantès)
Une copie inversée de notre tableau, sans les partitions et le vase et son socle, se trouve au château de Serrant, propriété de la fille de Tanneguy Duchatel, par son mariage avec Louis Charles de La Tremoille.
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Notes:
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PROVENANCE:
Conservé dans la famille du modèle depuis l'origine.
EXPOSITION :
Salon de 1799, n° 218 (Une jeune femme à la harpe).
BIBLIOGRAPHIE :
G. Cabannes, La galerie des Landais, 1930-1945;
G. Madec-Capy, sous la direction de B. Foucart, Guillaume Guillon-Lethière peintre d'histoire (1760-1832), 1998, P. 37.
Fils d'un martiniquais, Procureur du Roi à La Guadeloupe et d'une guadeloupéenne, Guillaume Guillon vient travailler à Paris en 1777 dans l'atelier du peintre d'histoire Gabriel-François Doyen, après un passage?à Bordeaux et à Rouen. Il est à Rome comme pensionnaire de l'Académie de France jusqu'en 1791 et ouvre son atelier en rentrant à Paris. En 1799, il travaille à une série de quatre tableaux sur l’histoire romaine. Seuls deux furent achevés : Brutus condamnant ses fils à mort dont il présente une esquisse aux Salons de 1795 et 1801 avant d’achever le grand format en 1811 (toile, 440 x 783 cm, acquis par le musée du Louvre en 1819), et Philoctète dans l’île de Lemnos qui reçoit le prix d’encouragement au Salon de 1798 (toile, 345 x 315 cm, Musée du Louvre). Il est nommé à la tête de l’Académie de France à Rome en 1807 et poursuit une grande carrière de peintre d’histoire.
Sur notre tableau, il signe encore Le Thiere (troisième fils de Pierre Guillon). Reconnu par son père la même année, il modifiera alors son nom en "Guillon Lethière".
Rares sont les portraits peints par Guillon Lethière. Il réserve ce genre à des intimes. En 1806, il représente les portraits du frère et de la soeur de l'empereur, Portrait de Lucien Bonaparte (Toile, 223 x 162,5 cm. Vente, Paris, George V, Mes Ader Tajan 15 décembre 1993, n° 89) et Portrait d'Elisa Bonaparte (Toile, 217 x 141 cm, Château de Versailles et de Trianon).
Dans notre tableau, il donne une dimension particulière à l'instrument de musique. La présence de la harpe est aussi importante que celle du modèle, cela pour signifier l'importance du lien entre Adèle Papin et son instrument.
Notre tableau indique les relations amicales entre le peintre, la modèle et le facteur de harpe, probablement auteur aussi de la partition.
Notre harpe ressemble fortement aux instruments réalisés par Jean Henri Naderman (fig 1) puis ses fils.
Originaire de Frigourg, Jean Henri Naderman arrive à Paris en 1762 au service de la reine Marie Antoinette pour réaliser et perfectionner ses harpes. Harpiste, compositeur, facteur de harpes, il tient un magasin de musique à Paris. A sa mort en 1799, sa femme et ses deux fils, François Joseph et Henri reprennent son activité. Ces derniers sont aussi professeurs. François Joseph est le plus réputé, il ouvre la classe de harpe au Conservatoire de musique de Paris. En 2013 est passé en vente un recueil de musique offert par Naderman fils à Mademoiselle Adèle Papin (Piasa 11 juin 2013, n° 70).
Contemporaine de François Joseph Naderman, Adèle Papin (1782-1860) est originaire de Mont-de-Marsan (son père, Jean Baptiste, est avocat, receveur des Finances et membre du Corps législatif en tant que député des Landes). Adèle a 17 ans, lorsqu'elle est représentée par Guillon Lethière jouant probablement pour sa mère, selon la dédicace inscrite sur le livret de partitions. Elle est représentée dans un intérieur richement meublé, elle est assise sur un fauteuil Jacob, devant un vase à l'Antique. Elle est vêtue d'une robe de mousseline. Avec son châle sur sa chaise, cette mode marque une fracture avec les volumes de Marie-Antoinette et une recherche de beauté au naturel.
Est-ce par la branche des Papins de la Martinique que Guillon Lethière connait notre modèle.
Cela reste à élucider. Notre tableau nous plonge dans l'intimité du modèle, avant le dynamisme de sa vie d'épouse au début des années 1800. Elle épouse en effet en 1802 le comte Charles Jacques Nicolas Duchatel (1751-1844), de trente ans son aîné (membre du Conseil des Cinq Cent puis Conseiller d'Etat sous Napoléon, il est fait comte d'Empire en 1808) et devient dame de compagnie de Joséphine de Beauharnais. Ils ont deux fils, Tanneguy (1803-1867) et Napoléon-Joseph (1804-1884).
Tanneguy est un prénom familial rappelant les hauts faits de Tanneguy Duchâtel, chambellan et prévôt de Paris, conduisant le dauphin, futur Charles VII, hors de Paris la nuit du 28 au 29 mai 1418, quand les bourguignons entrent dans Paris (tableau de Louis Charles Auguste Couder vers 1827 Rennes Musée des Beaux-Arts). Le prénom donné à leur deuxième fils, Napoléon-Joseph, pourrait laisser soupçonner une possible liaison d'Adèle avec l'Empereur. Elle s'installera à la fin des années 1810 au château de Mirambeau en Saintonge. « Elle [était] faite pour plaire, tant par sa grâce naturelle que par celle qu’elle voulait avoir. Elle avait de plus un fort joli visage, de belles dents qu’elle savait faire valoir, un nez aquilin qui se faisait peut-être un peu trop valoir sans qu’elle s’en mêlât, et quoiqu’assez maigre, une grande distinction dans la tournure » (Joseph Turquan d’après la Duchesse d’Abrantès). « Elle possédait un charme irrésistible dans le regard prolongé de son grand œil foncé de sa double paupière […]. De tout ce que je viens de dire, il résultait un ensemble qui attirait d’abord, et puis qui attachait ». (Mémoires de la duchesse d’Abrantès)
Une copie inversée de notre tableau, sans les partitions et le vase et son socle, se trouve au château de Serrant, propriété de la fille de Tanneguy Duchatel, par son mariage avec Louis Charles de La Tremoille.
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